Accueil

Articles

Photos

Profil

Contact

La ministre en chef du Tamil Nadu condamnée


Thèmes: Politique

Les Echos, 30 septembre 2014

L'Etat indien sous le choc de la condamnation de Jayalalithaa pour corruption.

Patrick de Jacquelot
— Correspondant à New Delhi

Dans un pays où l'on est un peu blasé en matière de démêlés judiciaires des leaders politiques, on n'avait quand même jamais vu ça : la ministre en chef de l'Etat du Tamil Nadu est passée directement, samedi 27 septembre, des ors et pompes de sa fonction de chef du gouvernement d'un des plus grands Etats indiens (72 millions d'habitants) à une cellule de prison à Bangalore. Dans la foulée, son parti a dû nommer dès le lendemain un nouveau ministre en chef pour que le Tamil Nadu ne demeure pas sans gouvernement.

C'est un tribunal spécial constitué dans le Karnataka voisin (pour échapper aux pressions) qui a condamné Jayalalithaa Jayaram. Au terme de dix-huit ans de procédures, elle a été envoyée en prison pour quatre ans. Elle devra aussi payer une amende de 1 milliard de roupies (13 millions d'euros), une somme colossale à l'échelle de l'Inde.

28 kilos d'or, 12.000 saris

Jayalalithaa, du cinéma à la politique, une vraie star...
(photo newslok.com)

Son crime ? Un « enrichissement inexpliqué » remontant aux années 1990. A l'époque, cette ex-vedette de cinéma devenue patronne de l'un des deux grands partis politiques du Tamil Nadu était - déjà - devenue ministre en chef. A son entrée en fonctions en 1991, elle avait déclaré un modeste patrimoine de 250.000 euros. Et pour prouver son désintéressement, elle s'était attribuée un salaire… d'une roupie. Mais cinq ans plus tard, sa fortune déclarée était de 8,5 millions d'euros. Outre des terrains et des entreprises diverses, la dame possédait 28 kilos d'or et 12.000 saris, réussissant ainsi à se distinguer dans un Etat connu pour la corruption de sa classe politique. Il est vrai qu'elle était aussi célèbre pour les distributions massives de télévisions ou ventilateurs qui lui assuraient ses victoires électorales. De procédure en procédure, les poursuites ont donc mis dix-huit ans à déboucher, et n'ont pas empêché Jayalalithaa de redevenir ministre en chef trois fois. Bien sûr, elle va faire appel et sortira sans doute de prison dans quelques semaines. Mais le durcissement récent de la législation fait qu'elle a été démise de ses fonctions de membre du Parlement du Tamil Nadu, obligée de quitter le gouvernement et qu'il lui est interdit de se représenter avant d'avoir été éventuellement blanchie par la justice.

Dans l'immédiat, c'est toute la vie politique du Tamil Nadu qui est rebattue. A l'annonce de la chute de Jayalalithaa, ses partisans ont attaqué des bus et des représentants du parti adverse. Et dans la tradition ultra-émotive de l'Inde du Sud, une demi-douzaine de ses adorateurs qui la surnomment Amma (mère), se sont suicidés, dit-on.


Accueil

Articles

Photos

Profil

Contact